02 juin, 2019

X-MEN CLASSIC #3, L'OURS DEMON de Chris CLAREMONT et Bill SIENKIEWICK, éditions Panini Comics

La série LEGION a été mon gros coup de coeur de ces 2 dernière années.

La saison 3, ne va pas tarder à sortir.

J'en profite pour ressortir un texte que j'avais écrit sur les Nouveaux Mutants.

Quel rapport, me direz-vous ?

Et bien le personnage de Légion a été crée par Chris CLAREMONT et Bill  SIENKIEWICZ dans le numéro #25 des Nouveaux Mutants, pardi !

NOTA BENE :

Aucune suite n'avait été publiée à l'époque. Clairement, la revue ne s'était pas vendue et quel dommage !

Mais depuis et grâce à la sortie annoncée du film (annulé, programmé, re-annulé, re-programmé...), Panini a sorti une édition luxe de l'intégralité du run des deux Messieurs en 2018.

Merci le cinéma !

Foncez vous la procurer !!!
Il y a fort à parier qu'elle ne soit jamais rééditée...

Voici un visuel de la couverture :




Bon, j'adore les Nouveaux Mutant de CLAREMONT et SIENKIEWICZ !

Je vous laisse découvrir pourquoi... 



LA SAGA DE L'OURS DEMON
Chris CLAREMONT
Bill  SIENKIEWICZ
 


Au sommaire de la revue trimestrielle X-MEN CLASSIC #3 de septembre 2012, Panini nous gratifie de la réédition des épisodes de THE NEW MUTANTS #18 à #22, parus initialement de septembre 1984 à novembre 1984 aux Etats-Unis, à savoir ceux qui marquent le début de la collaboration entre Chris CLAREMONT en tant que scénariste et Bill SIENKIEWICZ en tant que dessinateur.

Elle contient notamment la saga de l'ours démon demeurée mythique en France suite à sa mutilation / censure dans Titans.

La couverture française de l'épisode 18 redessinée pour le
Titans #76 (aucune des autres couvertures n'a jamais été publiées, même redessinées) :


Les couvertures originales :


LES NOUVEAUX MUTANTS, de quoi s'agit-il ? 


D'une équipe de jeunes adolescents dotés de super pouvoirs réunis par le professeur X alors que celui-ci crois que "ses" X-MEN sont morts dans l'espace (nous sommes en 1982). Il découvre / enrôle alors de jeunes recrues pour perpétuer son rêve de cohabitation entre humains et mutants et les fait intégrer les locaux de Westchester alors vides, pour les former.

Il y a dans un premier temps, Sam Guthrie alias Rocket, un jeune paysan du Kentucky, invulnérable sous sa forme de fusée humaine, l'indienne cheyenne Danielle Moonstar alias Moonstar qui peut créer des illusions à partir des peurs ou des désirs de ses ennemis, Xi'an Coy Mahn alias Karma, une vietnamienne pouvant posséder les esprits, l'écossaise Rahne Sinclair alias Félina, une lycanthrope, Roberto DaCosta alias Solar, un brésilien absorbant la lumière solaire et gagnant ainsi une force surhumaine.

Ils seront suivis  ensuite par deux nouvelles recrues : Amara Aquila alias Magma, venue de la Rome antique et pouvant contrôler la lave et Illyanna Raspoutine alias Magie, la soeur de Colossus possédant des pouvoirs mystiques.


Voici donc la composition du groupe au moment où commence l'épisode #18.

- Episodes #18 à #20 : la saga de l'ours démon (celle qui donne son titre au recueil) s'ouvre sur une première page magistrale où nous voyons Moonstar hantée par un cauchemar, récurrent,  celui d'un ours, le tueur de ses parents.
Elle va alors décider de l'affronter pour tenter de s'en libérer. La confrontation va mal se passer et elle va se retrouver à l'hôpital en soins intensifs...
(A noter que ce premier épisode contient aussi une scène saisissante du professeur X abattu par balles. Scène d'un futur hypothétique qu'a une femme rousse rôdant devant l'école. Je vous laisse découvrir ce splash de toute beauté.)





-
Episode #21 : les filles de l'équipe organisent une pyjama partie avec des adolescentes de l'extérieur. C'est justement ce soir là que l'entité extraterrestre Warlock va "choisir" pour atterrir à proximité de l'école...

-
Episode #22 : un épisode de début d'arc. Le commencement d'une histoire qui va impliquer le Club des Damnés. Les pages du conte de fée sont surprenantes notamment celles très "Disneyienne" qui reprennent un graphisme à la Blanche Neige (cf. la couverture du numéro #22 pour se faire une idée)...

LES NOUVEAUX MUTANTS ont été créés dans le MARVEL GRAPHIC NOVEL #4 en 1982 par Chris CLAREMONT et Bob McLEOD, mais la série régulière ne commencera qu'en 1983.

C'est le premier spin-off de la franchise X-MEN et la première fois que coexistent deux équipes mutantes dans deux titres distincts en librairie. MARVEL franchit donc le Rubicon et le fait avec CLAREMONT alors au sommet de sa gloire (nous sortons à peine de DARK PHOENIX SAGA et DAYS OF FUTURE PAST et les UNCANNY X-MEN se vendent à plusieurs millions d'exemplaires).

Cette deuxième série s'inscrit donc dans la continuité des UNCANNY X-MEN et  développe une interaction avec elle.

Tout cela donnait dans les faits plutôt des histoires un peu nunuches avec des ados de 14 ans chaperonnés par un Charles Xavier paternaliste où d'un côté nous avions un aspect apprentissage et de l'autre celui du métissage, qui l'un comme l'autre avait fait le succès des X-MEN. Le ton était léger, les dessins de  Bob McLeod comme ceux de Sal Buscema très "lisses".

Rien de bien passionnant...

McLeod, épisode #3  
Sal Buscema, épisode #17
Le public qui lui avait vieilli voulait autre chose, quelque chose de plus mature. Il fallait donc moderniser la série, la rendre plus adulte sous peine qu'elle n'intéresse personne. 

Le coup de génie de Ann NOCENTI alors éditrice du titre est de laisser carte blanche à un dessinateur peu connu jusqu'alors : Bill SIENKIEWICZ.

Et qu'est ce que cela a changé me direz-vous ?

Tout, absolument tout !



L'approche de SIENKIEWICZ est révolutionnaire !

Jusqu'alors très influencé par Neal ADAMS, son trait assez réaliste (notamment dans MOON KNIGHT) va prendre ici une forme toute autre, complétement expérimentale.

Il brise les lignes, qui deviennent parfois anguleuses à l'extrême.

L'utilisation d'aplats de couleurs (notamment rouge) vient renforcer le sentiment d'abstraction.

Les dessins ne se laissent pas enfermer dans les cases. Ils en jaillissent tout en énergie.

Les personnages y gagnent une densité, une présence singulière.

Les bruits et sons acquièrent également une dimension à part entière au travers d'onomatopées qui prennent littéralement possession de certaines cases.

 


Le personnage de Warlock synthétise admirablement ce bouillonnement permanent, cette tension qui habite chaque case. L'entité extraterrestre techno-organique, masse noire dans laquelle se dessine à grands traits des circuits imprimés tantôt bleutés, tantôt jaunâtres, instable physiquement, capable de prendre n'importe quelle forme, permet à SIENKIEWICZ de s'exprimer pleinement.


Egal à lui-même, CLAREMONT livre des scénarii où toutes ses thématiques favorites sont abordées : les incertitudes de l'adolescence, le manque de confiance en soi, les émois amoureux... 

Mais elles sont traitées sous un angle plus mature, ou plus exactement elles n'infantilisent plus les héros comme c'était le cas précédemment.

Le talent de SIENKIEWICZ y est pour beaucoup.

L'alchimie entre le texte et les dessins, la force des découpages, l'originalité du trait, la crudité des couleurs, instillent une atmosphère qui ne peut laisser de marbre le lecteur.

Ainsi dans la saga de l'ours démon, une ambiance  d'horreur sourde suinte de chaque image. 

L'impuissance de chacun des héros face aux forces mystiques qui  se déploient est palpable.

Le récit de CLAREMONT lui gagne en densité grâce à cette audace visuelle inouïe.

Ces planches affirment toute la puissance d'un artiste majeur en devenir qui explosera littéralement par la suite.

Elles participent également à la révolution qui se met en place dans le monde des comics à cette époque.

Le fait que l'on croise Rachel Summers issue du futur, les Starjammers, certains membres des X-MEN (Tornade en punk, Diablo, Colossus), que l'on assiste à la destruction de l'astéroïde M, que le professeur X fasse explicitement mention à Stephen Strange, montre la volonté de CLAREMONT, d'une part de densifier son univers et d'autre part de le rattacher à celui de MARVEL.

Par tous ces aspects, THE NEW MUTANTS de CLAREMONT  et SIENKEWICZ prend part à l'émergence d'une ère moderne.









L'initiative de PANINI, bien qu'elle aurait mérité un plus bel écrin, est excellente ; permettre de (re)lire des épisodes rares qui ne sont parus en France que dans
Titans tronqués ou dans la collection comics USA (pour la saga de l'ours démon), les uns et les autres depuis belle lurette épuisés.

La traduction de Jérémy MANESSE est impeccable.

Pourquoi a-t-il fallu que Christian GRASSE se sente obligé d'asséner à la fin de la revue : " Bien sûr, nous n'apprécions pas de vous laisser sur une histoire en cours, nous espérons donc sincèrement que vous serez nombreux à acheter ce numéro, car ça voudra dire que nous pourrons poursuivre le run de CLAREMONT et SIENKIEWICZ dans un autre numéro de X-MEN CLASSIC en 2013 ".

Laissons de côté cette mesquinerie et affirmons-le très fort, X-MEN CLASSIC #3 est un joyau qu'il faut se procurer, même si la suite n'est jamais publiée...


 

Publié par yugen